Comment faire l'amour avec un nègre sans se fatiguer
de Dany Laferrière

critiqué par Alma, le 27 avril 2009
( - - ans)


La note:  étoiles
Noir et blanches
Un roman construit sur le principe de la mise en abyme puisque Dany Laferrière, écrivain d’origine haïtienne dans ce roman : COMMENT FAIRE L’AMOUR AVEC UN NEGRE SANS SE FATIGUER relate la période pendant laquelle un noir a écrit un roman intitulé : PARADIS DU DRAGUEUR NEGRE .

« 36 jours et 18 nuits » dans une petite chambre miteuse du Carré Saint Louis à Montréal , en colocation avec un autre noir : Bouba, qui, ou bien dort ou bien « boit, lit, mange, médite et baise sur le divan » ou enfin écoute du jazz . A l’étage du dessus , un locataire : Belzébuth, qui lorsqu’il baise fait beaucoup de bruit ....Nuits agrémentées de la diffusion de morceaux de Charlie Parker, Charlie Mingus , et aussi d’étreintes torrides avec de jeunes américaines de bonne famille toujours désignées par Miz ( on croise Miz Littérature, Miz Cover Girl, Miz Suicide….. ), venues vérifier la véracité de la flatteuse réputation des Noirs en matière de sexe, s’éclater avant de convoler avec un blanc sérieux et mener une vie rangée de femme WASP .

Un roman constitué d’une succession de brefs chapitres proposant chacun une petite scène et dont le titre est tout un programme et contient le plus souvent un terme à connotation sexuelle , un roman au style sec, aux phrases juxtaposées, dont le rythme haché rappelle celui du jazz .

Beaucoup de clichés, certes, sur les noirs et sur les blanches mais présentés toujours avec un humour à la fois cru, sain et jubilatoire .
L'homme noir à Montréal, entre vie de bohème et joies sensuelles 8 étoiles

Ce roman de Dany Laferrière met en scène deux jeunes noirs qui partagent le même appartement dans un quartier de Montréal. Il y règne une bonne humeur car nos personnages aiment le jazz, la littérature et les femmes blanches pour être précis. Le narrateur a le projet d'écrire un roman dont le titre rappelle étrangement le roman que nous sommes en train de lire. Cette mise en abyme a quelque chose d'amusant. Bouba, le coloc du narrateur, dort beaucoup, lit le Coran et mène une vie de bohème. Dans le roman, le narrateur cite Bukowski, référence littéraire qui semble avoir influencé la rédaction de ce roman, sans le caractère sale de l'écrivain américain.

Ce roman est vif et se lit facilement. Les dialogues sont joyeux, les personnages hauts en couleur et la sensualité irriguent toutes les pages où des femmes blanches sont évoquées et rebaptisées par le narrateur avec comme titre "Miz". Le lecteur sourit souvent et est intrigué par le titre des chapitres qui est une véritable invitation à poursuivre la lecture. Il y a une légèreté qui peut rappeler certains textes américains, comme ceux de la Beat generation. Mais cette légèreté n'est que d'apparence. Derrière les rires et les plaisanteries des deux compères il y a une réflexion sur les noirs et les blancs et le fait que l'homme noir devient un idéal sexuel pour la femme blanche. L'homme noir a longtemps été exploité et a souffert de l'esclavage, donc ce nouveau statut est perçu comme une revanche. Tout ceci n'est pas évoqué avec agressivité, c'est plutôt la satire qui est utilisée pour évoquer les stéréotypes racistes. Il n'en demeure pas moins qu'il y a un fond plus critique et qui permet une réflexion sur notre rapport à l'autre avec la couleur de peau comme élément définitoire.

On passe vraiment un bon moment en compagnie de ces personnages et de l'écrivain dont le style enjoué et vif saura séduire le plus grand nombre. Le regard que portent les personnages noirs sur le monde est intéressant et forcément subjectif. Il saura amuser le lecteur comme lorsqu'ils prendront conscience que désormais les asiatiques les concurrencent dans l'imaginaire des filles blanches. Ce roman faussement léger peut être une bonne introduction dans l'oeuvre de Dany Laferière, surtout qu'il s'agit de son premier roman.

Pucksimberg - Toulon - 45 ans - 8 juillet 2025


Sueur, corps et vérités crues 9 étoiles

Résumé : Un noir de Montréal demeure dans un petit appartement miteux avec son ami Bouba. Ensemble, ils réfléchissent sur la nature sexuelle des relations entre "le Nègre" et la "Blanche", tout en l'expérimentant, alors que le personnage principal consigne le tout dans un roman.

Mon avis : Comme première intrusion dans l'Oeuvre de Dany Laferrière, j'ai été très agréablement surpris de ce cadeau surprise. Un mélange d'érudition, d'humour, d'observations crues et libidineuses. Et ça marche. Laferrière offre ici une réflexion (qu'elle ait été véridique ou non, on y croit) qui sonne juste sur les relations entre nègres et blanches, dans le contexte du début des années 1980 à Montréal. Les dialogues ont du mordant et l'atmosphère, suintante jusque dans les mots, s'accroche aux corps comme une flaque de goudron.

J'ai un peu moins aimé la place que prends la création du roman vers la fin du livre. J'aurais aimé que la relation entre Miz Littérature et le personnage principal se développe davantage, mais l'auteur a vraisemblablement choisi de ne pas aller par là. Une excellente lecture que j'ai vraiment aimée !

Calepin - Québec - 44 ans - 9 août 2009