Mythologie du .12 de Célestin De Meeûs

Mythologie du .12 de Célestin De Meeûs

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Pucksimberg, le 29 août 2024 (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 45 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 750ème position).
Visites : 3 251 

Quand le prosaïsme flirte avec le mythe

Célestin de Meeûs décrit un jour de solstice d’été pas comme les autres alors que tout semblait ancré dans la routine et l’ennui au début. Théo et Max sont deux copains qui errent, fument des joints et plaisantent afin de meubler leur existence. Parallèlement, le lecteur suit Rombouts, un médecin, qui ne vit plus sous le même toit que ses enfants et son épouse à cause d’une infidélité éphémère. Il souffre de cette séparation radicale et soudaine. Dans la première partie du roman s’entremêlent ces deux quotidiens. Dans le seconde partie, la structure évolue en lien avec les événements du roman. Ces personnages ont des points communs dans le fait qu’ils ne contrôlent plus totalement leur rapport au réel, avec l’influence de l’alcool, des joints ou d’émotions fortes qui prennent le dessus sur la raison. Le roman aborde ces moments où tout nous échappe, où malgré la banalité de l’existence l’imprévu peut surgir de nulle part.

J’avais lu « Cavale russe », le poème de cet auteur et j’avais adoré ce voyage en Russie, poétique, réaliste, prosaïque et séduisant malgré tout. Ici, l’auteur s’essaie au genre romanesque et c’est réussi. Même si le début du roman me donnait l’impression d’être ancré dans la morne monotonie du quotidien et ne raconter que la banalité, le roman parvient à séduire le lecteur qui est porté par la narration de l’écrivain. Le lecteur parvient à entrer dans la psyché des divers personnages, apprend à les connaître et pressent assez vite ce qui pourrait se dérouler. Le roman n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît et l’on sent assez vite une construction aboutie, avec cette lumière éclatante au départ remplacée par l’obscurité ensuite, et des remarques qui invitent parfois à interpréter et à aller au-delà de ce qui est apparent. Le personnage de Théo, dieu en grec, s’interroge sur la création du monde dans les mythes grecs. C’est pour cette raison que nous ne sommes pas très surpris de voir le fils de Rombouts s’appeler Achille.

L’écriture donne de la force à ce récit dont la trame est somme toute très simple. Les phrases sont très longues et elles happent le lecteur qui se voit pris dans le rythme du style de Célestin de Meeûs. Parfois, les virgules sont omises ce qui permet de mieux coller aux idées des personnages, comme si la pensée allait vite et les impressions se superposaient. Quelques passages sont poétiques, bien que cela soit moins visible que dans les poèmes de l’auteur. Les descriptions de la lumière et des insectes le sont. Sa façon d’écrire nous donne vraiment l’impression de nous immerger dans les personnages et de ressentir leur colère ou leur désœuvrement, surtout que ces personnages ne sont pas des héros. Ils ressemblent à des millions d’individus. Ils incarnent l’homme d’aujourd’hui, avec ses questionnements, ses réactions impulsives parfois et sa difficulté à donner du sens à ses actions.

Un roman de la rentrée littéraire 2024 qui sort des sentiers battus et des romans formatés.

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Hasard ?

9 étoiles

Critique de Bafie (, Inscrite le 19 juillet 2004, 64 ans) - 22 octobre 2025

Quelle est cette fâcheuse et pure coïncidence qui, très vite, m’a fait recouper cet écrit avec un fait divers de la fin des années 90…un bug à l’avance alors que s’annonçaient les années 2000.

Belle idée que de remémorer cette triste et sombre histoire sous couvert de la fiction¹.

Un récit court et dense.

Une écriture sensible, vibrante qui dit ce qui se trame derrière les apparences, ce qui s’effrite et se délite.

Des mots qui tentent de dresser un état des lieux en gardant la musicalité de la poésie.

Deux univers coexistent et s’ignorent.

D’une part Théo et Max, jeunes désoeuvrés, à l’heure de choix de vie qui les dépassent, les effraient.

D’autre part, le docteur Rombouts, la quarantaine désabusée malgré la réussite matérielle.

On pressent que ces deux univers vont se rencontrer et on appréhende cette rencontre.

Trois unités temporelles : la soirée, sa chaleur, sa lumière, le bitume, la route, il s’en dégage de l’ennui, on ressent une tension sous-jacente. Le début de nuit, lumières tamisées, obscurité, humidité, il s’en dégage un certain apaisement.

La confrontation entre les deux univers suscite une explosion, ouvre la troisième période et nous laisse dans une certaine hébétude.

J’ai été vivement impressionnée par cet écrit, je vais me hâter de découvrir la poésie de l’auteur et j’attends aussi avec impatience ses prochains textes. Il vient de rejoindre la liste des nombreux auteurs que je suis parce que je ressens leur écriture comme nourrissante.

1. En décembre 2020 « Un jour dans l’info », émission de la RTBF était consacrée à ce fait divers. Cette émission avait fait l’objet d’un litige opposant Pierre Riga, ainsi que plusieurs membres de sa famille, à la RTBF. le tribunal de première instance de Bruxelles devait examiner si le droit à l’oubli des demandeurs, dont l’un avait été condamné à une peine de prison, devait primer sur la liberté d’expression de la RTBF.

https://rtbf.be/article/…

Ce livre faisait partie de la sélection Prix Première RTBF 2025

Forums: Mythologie du .12

Il n'y a pas encore de discussion autour de "Mythologie du .12".